Paris: Fleurs de Ruine et Remise de Peine par Patrick Modiano

Quand on est Belge, Paris n’est pas tout à fait une ville de l’étranger. Bien sûr, l’heure et vingt minutes du Thalys a fait du voyage à Paris l’équivalent d’une longue navette. On vient en voisin, et il n’est pas inconcevable de tomber nez-à-nez avec un cousin au coin de la rue ou à l’entrée d’un musée. C’est aussi l’habitude d’entendre, de lire et de voir les quartiers et les rues de Paris au journal télévisé, au cinéma, dans les journaux ou les romans : Boulevard Richard-Lenoir, Rue de l’Abbé-de-l’Epée, Rue Lepic, Rue Monsieur-le-Prince

Boulevard Richard Lenoir

Boulevard Richard Lenoir

Rue Lepic

Rue Lepic

Et lire Patrick Modiano, c’est se promener dans Paris, un peu au hasard, sans consulter de plan, faisant confiance à sa mémoire dans laquelle se mêlent souvenirs personnels, histoire et fiction.

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« Fleurs de Ruine » nous mène dans plusieurs quartiers, passant, non sans quelque appréhension, de la rive gauche à la rive droite. Le narrateur cherche à comprendre les raisons du suicide de deux jeunes époux apparemment bien rangés en 1933, au 26 rue des Fossés-Saint-Jacques. Est-ce une rencontre fortuite près de l’Ile des Loups qui a fait basculer le drame ? Dans sa quête, il croise la route d’autres personnages au passé flou et au présent incertain. Comme dans la plupart des romans de Modiano, il semble que tous les chemins mènent, de façon détournée, à la rue Lauriston.  Et donc à son père, Albert Modiano, arrêté deux fois comme juif lors de rafles en 1942 et 1943, mais mystérieusement libéré par des membres de la bande de la rue Lauriston, un groupe de malfrats transformés en « Gestapo française ».

Rue Fosses St-Jacques

Rue Fosses St-Jacques

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Modiano voudrait parfois s’échapper de cette recherche qui semble ne jamais le lâcher, l’attendre derrière chaque coin de rue. Ainsi, dans « Fleurs de Ruine » : « Une fille s’avançait sous les feuillages des arbres du boulevard Jourdan. Sa frange blonde, ses pommettes et sa robe verte étaient les seules notes de fraîcheur dans ce début d’après-midi d’août. A quoi bon tâcher de résoudre des mystères insolubles et poursuivre des fantômes, quand la vie était là, toute simple, sous le soleil ? ».

Cité universitaire, boulevard Jourdan

Cité universitaire, boulevard Jourdan

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« Remise de peine » est le plus émouvant des livres de Modiano que j’ai lu, peut-être parce qu’il évoque la figure de Rudy, le frère de Modiano, mort d’une leucémie à 10 ans. Deux enfants, Patoche et son frère, sont confiés, dans un village proche de Paris, à un groupe de quatre femmes. Leur mère est en tournée avec sa troupe de théâtre, le père sans doute en voyage d’affaires en Afrique. Les deux enfants observent les allées et venues de ces femmes et de leurs visiteurs qui viennent dans de belles voitures américaines et les laissent monter à bord. Que saisissent-ils de ce théâtre d’ombre ? Que devinent-ils, le soir, quand on leur demande de monter dans leur chambre ? Ils rêvent de visiter le château abandonné au bout du village – confisqué comme profit illicite à la Libération- dont leur père a dit connaître le propriétaire. Certains soirs, ils se faufilent tous les deux hors de la maison, s’approchent du château, mais jamais n’en franchissent les grilles.

Patrick et Rudy Modiano

Patrick et Rudy Modiano

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Un jour en rentrant de l’école, les femmes qui s’étaient occupés des deux frères pendant près d’un an, ont disparues. Une voiture noire stationne devant la maison. Un gendarme leur demande :

« – Qu’est-ce que vous faites là ?

  • C’est ma maison, lui ai-je dit. Il est arrivé quelque chose ?
  • Quelque chose de très grave. »

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Rue Monsieur Leprince

Rue Monsieur Leprince

 

 

 

2 réflexions sur “Paris: Fleurs de Ruine et Remise de Peine par Patrick Modiano”

  1. Génial ton blog Damien! Rien sur l’Afrique? Figure toi qu’on vient d’atterrir dans notre nouvelle terre d’accueil, à savoir le Maroc… (Casablanca).

    Ceci dit, je rentre lundi en Belgique et organise un dîner entre nanas: Céline est-elle en Belgique… et peux-tu me rappelle son email et GSM (belge)?

    PS Pour les romans en anglais, je me tâte de me lancer avec « Good Read »… Maintenant que j’aurai plus d’aide au Maroc, je trouverai sûrement plus le temps de lire! J’admire ton efficacité en tous cas.

    Au plaisir de te revoir en Belgique, DC… ou à Casa?!